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La vente de biens immobiliers est soumise juridiquement à des règles spécifiques afin de protéger l’acquéreur comme le vendeur.
Ainsi par exemple, l’achat d’un bien sera réalisé en deux étapes : la signature d’un premier contrat tout d’abord, puis la formalisation de la vente après l’écoulement d’un délai de trois mois.
Ce délai permet notamment à l’acquéreur de pouvoir obtenir un prêt pour financer son acquisition.
Or il existe différents contrats permettant de s’engager à acheter, et de celui retenu découlent des conséquences importantes desquelles il est essentiel d’être informé.
Les termes promesse unilatérale de vente et compromis de vente sont souvent utilisés indifféremment dans la pratique, au point que bien des individus les emploient de manière interchangeable.
Ces deux contrats entrainent pourtant des conséquences différentes importantes selon que vous êtes acheteur ou vendeur.
Ainsi :
La conséquence la plus importante du choix entre ces deux mécanismes juridiques va concerner le potentiel paiement d’une dite « indemnité d’immobilisation » si l’acquéreur se désiste ou obtient un prêt à des conditions différentes de celles stipulées dans le contrat.
Ces deux contrats vont en effet comporter une clause prévoyant le paiement de (généralement) 10% du prix de vente au moment de leur signature, par l’acquéreur, entre les mains d’un séquestre (Avocat, Notaire ou Agent immobilier).
Ce séquestre a pour mission de conserver cette indemnité de 10%, et de la verser au vendeur si l’acquéreur se désiste et ne souhaite plus acheter.Le contrat d’engagement à acheter choisi va entraîner une qualification juridique différente de cette indemnité, et donc la possibilité de la revoir ou non à la baisse.
Quelques définitions tout d’abord afin de bien nous entendre.
La clause pénale est une clause fixant, à l’avance et indépendamment du préjudice subi, le montant de dommages et intérêts dû en cas de violation d’une obligation. Elle peut être revue à la hausse comme à la baisse par un Juge.
La clause d’indemnité d’immobilisation, quant à elle, est une clause fixant le prix de l’option d’achat laissée à l’acquéreur, c’est-à-dire de l’interdiction que se fait le vendeur de vendre à quelqu’un d’autre pendant trois mois. Son montant ne peut pas être revu par le Juge.
Or selon la Cour de cassation, les clauses prévoyant le paiement d’une partie du prix en cas de désistement de l’acquéreur sont bel et bien des clauses d’indemnité d’immobilisation lorsqu’elles sont présentes dans une promesse unilatérale de vente, mais en réalité des clauses pénales lorsqu’elles sont stipulées par un compromis de vente.
Cette solution est telle car l’indemnité a pour objet de faire assurer par l’acquéreur l’exécution de son obligation de diligence (à obtenir un prêt conforme aux stipulations contractuelles) et d’en sanctionner tout manquement lors d’un compromis de vente, et est donc une clause pénale venant sanctionner tout manquement à cette obligation.
En revanche, dans une promesse unilatérale de vente, cette indemnité n’est pas tant une sanction pesant potentiellement sur l’acquéreur qu’une contrepartie de l’option (d’acheter ou non, seul le vendeur s’étant fermement engagé) dont bénéficie l’acquéreur. En un tel cas, il ne s’agit donc pas d’une clause pénale, mais réellement d’une indemnité d’immobilisation.
Comme nous l’avons vu, seules le montant des clauses pénales peut être revu par le Juge[2], et non celui d’une indemnité d’immobilisation à proprement parler.
Si l’acquéreur ne peut pas conclure la vente, les 10% stipulés seront donc dus et non-discutables si vous avez signé une promesse unilatérale de vendre. En revanche, si vous avez signé un compromis de vente (ou promesse synallagmatique), alors l’acquéreur aura la possibilité de contester ce paiement en justice, ce que les Juges regardent habituellement avec faveur (et ce qui engage acquéreur et vendeur dans une procédure judiciaire longue et coûteuse).
Une telle situation peut sembler rare et relever d’une certaine mauvaise foi de l’acquéreur, mais il en est en pratique autrement : une simple erreur lors de la demande de prêt (montant inférieur ou supérieur à celui stipulé, taux d’intérêt ou nombre de mois de remboursement du crédit différents de ceux stipulés), souvent à l’initiative d’un acquéreur pensant bien faire, suffisent à le rendre redevable de l’indemnité prévue.
Ceci d’autant plus que les promesses contiennent de plus en plus fréquemment une clause selon laquelle une simple demande de prêt à des conditions différentes de celles stipulées, même en surplus du respect du nombre de demandes devant être faites aux conditions prévues par le contrat, entraîne automatiquement l’échec de la condition suspensive du fait de l’acquéreur et le rend ainsi redevable de l’indemnité.
La subtilité de ces situations et stipulations échappe bien souvent (et c’est normal) aux acquéreurs ou vendeurs particuliers, et les situations difficiles en découlant sont malheureusement bien trop nombreuses.
Ceci d’autant que si certains vendeurs sont compréhensifs, d’autres voient dans de telles situations l’occasion de « se faire de l’argent facile ».
De même, certains acquéreurs sont légers et négligent quant à eux les conséquences financières d’une absence de vente pour le vendeur.
Ainsi, si vous êtes acquéreur (ou représentant de l’acquéreur), vous avez intérêt à signer un compromis de vente.
En revanche, si vous êtes vendeur (ou représentant du vendeur), vous avez tout intérêt à signer une promesse unilatérale de vente.
L’Avocat gérant le cas échéant la signature de la promesse ou le Notaire gérant la vente sont tout à fait à même de rédiger pour vous l’un ou l’autre de ces contrats – à condition que vous sachiez ce qu’il vous faut demander.
Il est donc important de bien vous renseigner avant de procéder à l’achat d’un bien.
[1] En droit vendre et acheter sont deux prestations distinctes, l’existence de l’une n’entrainant pas nécessairement celle de l’autre. Vous pouvez ainsi vous engager à acheter sans que votre co-contractant s’engage à vendre, ou vice-versa.
[2] Code civil, article 1231-5